13 Sep
13Sep

Parole à l’auteur 

  

Auteur : Didier Berger

Bonjour, Didier, je (Kris) suis ravi de te faire cette interview, comment vas-tu ? 

Je vais bien merci, j’espère que toi aussi ? 

Oui très bien merci. Comment te sens-tu en ces jours de lancement de ton nouveau roman ? 

Très excité à l’idée de le partager. La crainte qu’on ne l’aime pas ou que mon bébé soit incompris et une grande attente des retours que j’espère nombreux…Qu'est-ce qui peut se passer dans la tête d'un auteur pour écrire un roman de cette trempe ? Nous allons tenter de percer le mystère....

J’ai eu la chance comme Tom de le lire en primeur, un gros morceau de littérature plein d’émotion, un livre épais qui malgré ses sujets forts est empli d’espoir comme tu le mentionnes dans ton résumé.

Oui, j’ai tenu à laisser transparaître le positif dans cette histoire… parce que ça me ressemble, simplement. Je ne suis pas quelqu’un qui me plaint, je fonce et ai toujours foncé dans la vie, malgré les obstacles… Comme Louis dans cette histoire.

Ça pour des obstacles, il y en a eu en effet dans cette histoire… Quel est le degré de vérité dans cette fiction ?

Je ne vais pas tout dévoiler bien sûr. Chaque auteur y met de soi dans les textes qu’il écrit et je ne déroge pas à cette règle. Mais pour ce livre, j’avoue m’être extrêmement impliqué et avoir beaucoup donné de ma personne. Mon vécu… 

Es-tu en train de me dire que les scènes de violences domestiques relatées dans ce livre ont bel et bien existé ?   

Je ne vais rien affirmer ici. C’est peut-être ma vie intime, peut-être mon vécu. Mais je n’ai jamais pris les lecteurices pour des idiots/tes, ils savent très bien reconnaître des textes sincères et par là même, s’ils sont fiction ou tirés d’un vécu…

C’est incroyable cette histoire. J’ai été bouleversé en la lisant. Pourtant on sent que tu as su y mettre une sorte de détachement pour pouvoir mieux retranscrire les ressentis et sentiments des personnages.

Oui, le petit garçon qui vit en moi m’a permis de prendre les choses avec légèreté et mettre de la distance avec toute cette violence se jouant devant mes yeux d’enfant. Être mal traité (ce que je n’ai pas été pour ma part et n’est pas le cas pour Louis dans cette histoire) c’est une chose, mais voir un proche, une mère en l’occurrence ici se faire tabasser par un bourreau, ça c’est autre chose…


Comment réussis-tu à rester aussi zen en répondant à ce genre de questions ? 

Pour être totalement clair et sincère, lorsqu’on vit de pareilles scènes, mieux vaut-il avoir assez de ressources et de force en soi pour les digérer. Ou la folie peut vite nous rattraper, les névroses nous ensevelir… 

Lors de nos nombreuses discussions sur le sujet, tu t’es souvent insurgé quant au fait qu’on parle de la violence domestique du point de vue de la femme, rarement de celui des enfants.

Oui, j’ai toujours été choqué et encore aujourd’hui comme on accorde si peu d’importance à ce que vivent et peuvent éprouver les enfants vivant de telles situations. Quelque part, c’est une deuxième punition, un reniement très pénible à avaler, car on a l’impression que si l’on nous écoutait, personne ne nous croirait. C’est très frustrant. Autant que de ne pouvoir sauver sa mère lors des batailles qu’elle mène face à son bourreau. Je ne dis pas qu’il ne faut pas parler de toute cette douleur que les femmes subissent (ou certains hommes d’ailleurs), mais cette façon d’évincer les enfants de ce problème et ainsi renier ce qu’ils vivent comme si ce n’était pas grave, m’horripile. Je crois qu’au contraire, et c’est bien expliqué dans le livre, l’avis des enfants vivant dans ces champs de guerre parentaux est très important.

Tu as donc bien vécu ce genre de situation d’après l’émotion que je ressens dans ta voix. Du reste, tu as été publié dans une ME pour un texte fort sur le sujet ?

Oui, ça fait longtemps. « Larmes Sèches » a été lancé en grande pompe au Salon du livre, quelques journalistes s’y sont intéressés, mais j’ai très vite réalisé que d’écrire de tel texte du point de vue de l’enfant mettait très mal à l’aise…

Pourtant tu as été le lauréat d’une bourse à l’écriture pour ce texte ?

Oui, et c’était vraiment inattendu. Ça m’a permis de vivre de mon écriture durant quelques mois afin de terminer cet ouvrage.

Bon, on ne va pas parler que de ce sujet brûlant, le principal dans ce roman étant la relation de Louis avec Maël et sa force de vaincre ? Dirais-tu que Louis est un héros

Un héros je ne sais pas, mais un p’tit gars qui en veux et assume, ça c’est sûr…

Tu en es un aussi ? 

Je ne sais pas. Quelque part, on est tous le héros de notre vie. Certains vont mieux s’en sortir que d’autres… Quelques-uns vont sembler avoir des pouvoirs surnaturels tant ils franchissent toutes les barrières se dressant devant eux/elles.Comme je le mets dans le livre, tous les parents d’enfants gays devraient leur remettre une médaille et les féliciter lorsqu’ils s’en sortent. Car assumer qui l’on est, est encore une autre histoire que de subir de la violence. C’est souvent compliqué et encore plus aujourd’hui avec les RS. Je crois que les gens en général ne réalisent pas vraiment à quel point c’est le parcours du combattant pour tous ces jeunes ne demandant qu’à être qui ils sont et comme ils l’entendent. Qu’à vivre et pouvoir montrer leurs sentiments comme tous les hétéros le peuvent… Je ne sais pas si de mon côté je suis un « héros », mais chaque personne différente ayant été confrontée à tous ces schémas dans lesquels ils ne se reconnaissent pas et réussissant à vivre leur vie est un héros quelque part. Louis dans mon roman fait ce qu’il pense être juste. Lorsqu’il protège son grand frère, lorsqu’il protège les animaux et prend soin de sa mère. Lorsqu’enfin il rencontre Karl, son petit paysan avec qui il va vivre ses premiers émois. Il est instinctif et ne se pose pas autant de questions que l’on pourrait imaginer. C’est plus tard, une fois adulte qu’on s’en pose et c’est pour tout le monde la même chose je pense.

Le Louis enfant est sacrément courageux dans cette histoire, pourtant, il est très jeune lorsque ça va au plus mal à la maison ?

Oui, il a autour des neuf à dix ans lorsque les situations les plus violentes le frappent de plein fouet. C’est un âge important. Un âge où l’on est capable d’analyser déjà des situations et comportements, mais où l’on a besoin de jouer et de croire en la vie… Dans le cas de Louis, c’est encore plus flagrant, le besoin étant encore plus grand avec ce qu’il vit tous les jours…

Parle-nous de Karl avant de nous parler de Maël, l’homme de sa vie… 

Karl est le fils d’un paysan qu’il rencontre grâce à Dimitri, un autre fils de paysan chez qui il va bosser presque tous les jours. Ça lui fait du bien. Être au milieu des animaux l’apaise et calme ses angoisses. Louis ne sait pas si Dimitri l’a percé à jour pour son homosexualité, mais il aime penser que oui, en lui présentant Karl à l’âge de onze ans. Le coup de foudre est immédiat, ils deviennent instantanément les meilleurs amis du monde…

Leur histoire est importante pour Louis ?

Très importante. Karl, c’est le miel de Louis lors de leur adolescence. Il égaye ses journées et sa vie, le séduit de jour en jour et bien évidemment, lui lance de puissantes pulsions qu’il ne maitrise absolument pas.

C’est le moins qu’on puisse dire ? 

Le premier amour est très important dans la vie de chacun de nous. Il est marquant. Et s’il est beau, c’est encore mieux.

Mais ce n’est pas Karl l’homme de sa vie ?

Non c’est Maël. Malgré la force de caractère de Louis, il lui faut du temps pour se laisser apprivoiser. Accepter d’être aimé et de pouvoir aimer. Ce n’est pas simple lorsqu’on voit ses parents censés représenter « l’amour » se déchirer pareillement. Toutes sortes d’images trottent dans notre tête. La peur des sentiments nous envahit, la crainte d’avoir mal est plus forte que tout…

Bon sang, si ça, ce n’est pas du vécu ?

Je ne dirai pas le contraire… Les parents qui se font la guerre ne réalisent absolument pas les dégâts que cela peut causer chez leurs enfants. Certains ne s’en remettent jamais.

Oui, du reste, pour le frère de Louis c’est bcp plus compliqué ?

Oui, c’est le moins qu’on puisse dire. C’est même très compliqué. Il y a de quoi être un peu perdu face aux émotions que nous légueront des sentiments que nous pouvons avoir pour quelqu’un. Le frère de Louis en est un bel exemple…

Pourquoi Maël alors ?

Parce que c’est le bon moment et qu’il arrive à temps pour laisser croire à Louis à une belle histoire possible. Parce que Louis a roulé sa bosse, s’est frotté à nombre de gars avant de rencontrer Maël. L’expérience acquise, il en fait quelque chose… Il la met à profit, ce que ne font guère la plupart des gens malheureusement… Et puis surtout, Louis respecte sa liberté.

J’ai bcp aimé cette force et cette assurance de savoir qui il est, vers qui penchent ses désirs…et ce, déjà très jeune ?

Louis est à l’écoute de son corps, il n’a que lui vers qui se tourner lorsque ça va mal, son identité sexuelle ne s’en trouve que plus affirmée lorsqu’il réalise que ce sont les garçons qui le branchent. Cela rend moins problématique ou dramatique sa différence qu’il prend très vite comme un avantage plus qu’un handicap. 

Mais comme le dit Maël, il n’a aucun doute ?

En vivant ce qu’il vit, en voyant ce qu’il voit, sa personnalité déjà bien affirmée ne fait que se renforcer. Son désir n’est plus qu’une formalité pour lui…

Malheureusement ce n’est pas le cas de beaucoup de gays…

Oui, chacun le vit à sa manière et avec ses armes. Chacun y va à son rythme, c’est malheureusement ainsi que va la vie. Le milieu dans lequel on vit est aussi très important pour se réaliser. 

Pourtant le milieu dans lequel vit Louis enfant n’est guère encourageant ?

C’est justement à cause ou grâce à ça qu’il se renforce au fil des années…

Mais comme le dit Maël, il n’a aucun doute ?

En vivant ce qu’il vit, en voyant ce qu’il voit, sa personnalité déjà bien affirmée ne fait que se renforcer. Son désir n’est plus qu’une formalité pour lui…

Tandis que son frère s’éteint à petit feu ?

Très juste, ainsi que sa mère. On naît tous différents et nous n’avons pas les mêmes atouts pour nous défendre ou affronter certaines situations. C’est plus compliqué pour certaines et certains tandis que ça semble plus simple pour d’autres… On ne sait pas vraiment d’où nous vient une telle force, Louis se pose souvent la question tout au long de ce récit. 

Et il donne des réponses ?

Bien sûr. Ce roman n’est pas seulement une histoire, c’est un livre qui peut figurer dans les rayons « développement personnel » parce qu’il permet déjà, de constater qu’on peut s’en sortir dans ce genre de situation. Qu’on peut être nous-mêmes. Qu’on peut bien vivre sa différence malgré les aléas et l’ambiance toxique dans laquelle on se débat. Cette différence en l’occurrence dans le cas de Louis, devient même une soupape de sécurité, son oxygène, sa raison d’être…

Quelle est la suite pour toi, tes projets ?

Je vais sortir 3 volumes de non-fiction qui je l’espère sauront trouver preneurs. « Demain m’appartiendra » complète quelque part ces 3 récits de développement personnel. Il donne des réponses et des précisions sur l’enfance vécue. 

D’autres romans MM ?

J’aimerais bien. Je dois terminer CAT-COVID que les gens ont adoré pendant le confinement et j’ai une idée pour raconter la vie du fils de Paulette du roman « Nevada » ou « Paulette » du roman Over the Rainbow ».

Sans parler des écrits de tes deux collègues que tu chapeautes d’une main de maître.

Je fais de mon mieux et je tiens à remercier Tom ici pour son aide. On reconnaîtra ici et là, je pense, sa patte…

Merci pour cette magnifique photo de toi et Max…



"Demain m'appartiendra" est à découvrir ici en version e-book et gratis dans la bibliothèque KDP : 

Yukon 2 - Plus fort que les vivants
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